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SAGESSE et MEMOIRE




La sagesse des peuples racines en terme d'environnement et d'humanité durables, de conservation d'un patrimoine culturel traditionnel, perpétuée depuis des millénaires, leur permet de fonctionner et de vivre sereinement auprès de (et avec) la nature, "la Terre mère" que tous respectent avec ferveur, y puisant nourriture et spiritualité. La terre est pour eux une mémoire qui garde inscrite en elle, leur histoire, l'histoire du monde et les clés de leur avenir. En préserver l'équilibre et l'harmonie en devient une question de survie.




Peuple Efe, Congo - photo de Jose AZEL

Peuple Efe, Congo - photo de Jose AZEL






Le vivant inspire les règles sociales
et les démarches éducatives



Sociétés holistiques, les sociétés "racines" tirent leurs règles sociales et politiques d'un lien fort avec le vivant, le milieu naturel dont ils dépendent pour leur survie.



"Contrairement à nos sociétés modernes, les sociétés racines n'ont jamais effectué de rupture avec le vivant. Elles se considèrent comme une composante parmi d'autres du corps vivant qu'est la terre. Cette relation privilégiée, vécue au quotidien, leur permet d'appréhender le monde comme un grand écosystème dont leur système politique et social est un prolongement."*



Vivant en harmonie avec leur environnement depuis des millénaires, ils nous enseignent que se soucier du monde, "la mère", revient à prendre soin des autres, les hommes, et à être en harmonie avec soi-même. Leur stupéfiante connaissance des interdépendances entre espèces leur permet de fertiliser des terres considérées par les autres paysans comme définitivement stériles. Ce savoir-faire vis-à-vis de la nature les protège et les nourrit. C'est de cette terre qu'ils sont nés, c'est grâce à elle qu'ils vivent et c'est vers elle qu'ils retournent au moment de leur mort.




Déclaration
d'un Indien Cree
Déclaration
d'un Chef Raoni



Peuple Tukano, Brésil - photo de Brian MOSER

Peuple Tukano, Brésil - photo de Brian MOSER






Le monde est perçu comme un tout
vivant, fragile et relié



Le monde (humain, minéral, végétal) est compris comme un tout vivant et fragile dont les composantes sont inter-liées par de permanentes interactions. La terre, n'est pas réduite à un simple espace géophysique capable de supporter tous les outrages, sans que l'homme en subisse lui aussi toutes les conséquences. C'est la perspective d'un monde qui ne sépare pas mais réunit.



Tout est équilibre entre un ensemble de composantes vivantes qui ont chacune un rôle et une fonction. L'ensemble ne fonctionne que parce que chacune des parties est reliée aux autres et remplit au mieux son rôle, ce qui oblige chacun à se sentir responsable de l'ensemble.



Chaque individu est reconnu comme faisant partie d'un tout, et étant partie nécessaire pour le fonctionnement de ce tout. Ainsi, chaque personne a sa place - à travers sa fonction, son rôle par rapport à la communauté - et à ce titre, a droit à la parole, à la reconnaissance et au respect.




Déclaration
d'un Chef Seattle
Déclaration
de Manu Marcello



Peuple Navajo, USA

Peuple Navajo, USA






Une expérience cyclique et renouvelée



"Le temps cyclique appelle la re-création du monde, contrairement au temps linéaire qui fige et établit une échelle de valeur entre un hier dépassé et un demain meilleur. Liées au vivant, dont elles tirent leurs règles collectives de fonctionnement, les société racines célèbrent chaque année le retour de la vie, l'existence d'un cycle vital de naissance, de maturité et de mort. Dans ce temps cyclique, les étapes fondamentales de la vie individuelle ou collective sont marquées par des rituels, une cérémonie spécifique, qui par le biais de l'expérience partagée permet l'intégration et la construction identitaire de chacun. Le temps cyclique permet en outre à chacun de faire sa propre expérience du monde, dans le cadre de règles incarnées par les anciens. Il s'agit de permettre à chacune des générations d'en faire l'expérience et donc d'ouvrir son champ de conscience."*




Déclaration
de Marcos Veron



Du dualisme à l'harmonie

Du dualisme à l'harmonie


Cette peinture sur peau, ancien autel, traduit la conception holiste des Indiens pueblo.
Les symboles de fertilité masculin et féminin, le jour et la nuit, le Soleil et la Lune,
le noir et le blanc, Dieu et l'humanité, sont ici autant de dualités qui régissent la nature entière.






Une finalité générale d'équilibre



La recherche d'équilibre régit tant leur santé que leurs prises de décision ou leurs arts…



"La notion d'équilibre, différente de l'immobilisme, palpite au cœur des sociétés racines. Équilibre de chacun avec soi-même, avec les autres, avec le monde. Il n'y a pas vraiment de concept de bien et de mal, mais plutôt de plus ou moins grande justesse, et de relativité : ce qui peut être juste dans une situation donnée peut s'avérer totalement inadapté dans une autre. L'équilibre se vit notamment dans les relations que les populations indigènes entretiennent avec la terre : si ces relations ne sont pas justes, les récoltes seront mauvaises, les parents ne pourront pas nourrir leurs enfants, ni satisfaire leurs obligations sociales d'échanges et de réciprocité. L'injustice et le déséquilibre risquent alors de pénétrer leur univers. Tout le travail que tentent de mener la plupart des sociétés racines vise à essayer de maintenir ou de rétablir l'équilibre du monde, que nos modes de fonctionnement déséquilibrent gravement."*




Déclaration
de Manu Marco Borro



Maïs

Maïs






Une mémoire collective



"Les sociétés autochtones accordent une grande importance à la mémoire. Mémoire des règles sociales du groupe, mémoire des événements auxquels s'est trouvée confrontée la communauté, mémoire des conséquences sur le groupe, et mémoire de la plus juste manière collective d'y répondre. Pour eux, cette mémoire ne peut pas être écrite. Elle doit être orale, portée par les membres du groupe. Écrite, la mémoire se dissocie des hommes et perd de son efficacité. Sur leurs projets en cours, les indiens passent de longues journées à analyser les propos de chacun, pour pouvoir les comparer à une situation analogue, vécue hier par la communauté. C'est en fonction d'un ensemble d'expériences similaires, gardées en mémoire par le groupe, que sont proposées et décidées les réponses futures."*




Déclaration
de Leaders indiens Brésil



Danse du maïs 1890

Danse du maïs 1890






L'usage de la médecine traditionnelle



Le monde industrialisé est face à une crise écologique. Cependant, peu d'économistes occidentaux admettent que les peuples autochtones ont quelque chose à leur enseigner. Leurs économies sont dites primitives et leurs technologies reléguées au stade de l'âge de pierre. Pourtant, ces modes de vie traditionnels se sont avérés tout à fait stables, dans des conditions souvent fragiles, où seuls ces peuples autochtones ont pu survivre et s'adapter sans pour autant bouleverser l'écosystème. La clé de ce succès est une gestion rigoureuse des ressources : puiser sans épuiser. Leur connaissance intime des plantes, du sol, des animaux, des climats et des saisons ne leur sert pas à exploiter la nature mais à vivre en harmonie avec elle.



La connaissance autochtone de la nature (certains appellent la forêt leur " université ") est détenue par les ancêtres, les chamans et les guérisseurs. Cette sagesse se transmet oralement de génération en génération. Rompre la chaîne entraînerait la perte définitive de ce savoir. Beaucoup de sociétés autochtones élaborent une taxinomie des sols, des climats, des plantes et des espèces animales, mettant en exergue leurs caractéristiques spécifiques. Les populations autochtones connaissent certains insectes et plantes n'ayant pas encore été identifiés par les botanistes et les entomologistes. Ainsi le peuple Hanunoo (Philippines) aurait relevé 1 600 espèces de plantes dans sa forêt soit 400 de plus que les scientifiques.



Face aux maladies, pour faciliter la guérison, les peuples autochtones tiennent compte du corps et de l'esprit. Les plantes médicinales sont utilisées pour traiter les origines spirituelles de la maladie autant que les symptômes physiques. De nombreux pays en voie de développement prennent conscience de l'énorme potentiel de la médecine autochtone. Facilement accessible, elle est moins chère que les médecines importées. Alors que les médicaments allopathiques sont banalisés, les médecins les plus éclairés se tournent à nouveau vers les remèdes traditionnels à base de plantes. Correctement étudié et appliqué, ce savoir pourrait révolutionner l'univers de la médecine. Cependant la crainte que le savoir autochtone ne soit exploité à des fins lucratives ne cesse de croître, plutôt que de servir à améliorer les conditions de vie des peuples et des communautés.



De nombreuses organisations autochtones revendiquent la reconnaissance par l'ONU et l'OMS de médecines ancestrales qui existaient bien avant l'apparition de la médecine moderne. Si le savoir-faire et l'utilisation des plantes médicinales tendent à disparaître chez de nombreux autochtones, la complémentarité entre le savoir traditionnel et le savoir universitaire semble voir le jour, puisque l'Unesco vient de reconnaître les connaissances médicinales telle celle des indiens Kallawayas de Bolivie, qui soignaient déjà les Incas. La mise en oeuvre de programmes spécifiques d'interaction entre les deux médecines, sous les auspices de l'ONU, pourrait donc permettre de sauvegarder un savoir ancestral et de mieux soigner les populations.




Déclaration
de Hayden Burgess
Déclaration
d'un Indien Guarani








Une parole partagée



"Pour éviter tout risque de déséquilibre et canaliser les conflits, les émotions, certains peuples tels les Kogis passent beaucoup de temps à parler. Moment privilégié d'écoute, de partage, expérience forte qui permet de réguler les tensions, d'exprimer les émotions et de nourrir la relation sociale. A trois, en famille, en groupe, la parole a une vertu apaisante et régulatrice. Les mots guérissent les maux. D'où la nécessité de relations interpersonnelles fortes, harmonieuses, pour ouvrir un tout social en permanente recherche d'équilibre. Et ce d'autant que leur société n'a pas de chef, à l'image de nombreuses sociétés "racines", et le pouvoir s'y trouve dilué reposant entre les mains de tous. C'est une société participative, régime d'assemblée où personne ne décide au nom des autres."*



Les problèmes, les difficultés doivent être formulés pour éviter les non-dits qui nuisent à l'harmonie des êtres et des lieux. Ce travail de "confession", de verbalisation du corps au cœur, puis à l'esprit et à la parole, se doit d'être réalisé tant sur le plan des mots que sur celui du cœur et de l'énergie.





Peuple Yanomani, Brésil - photo de Peter FREY

Peuple Yanomani, Brésil - photo de Peter FREY




* les cinq citations entre guillemets sont d'Eric Julien



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